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(Blogmensgo, blog gay du 6 novembre 2013) Moins de deux mois après les déclarations homophobes de son patron, la marque de pâtes Barilla lance une campagne en faveur de la diversité et de l’égalité.
Fin septembre, sur les ondes de la radio italienne Radio 24, Guido Barilla explique sa position sur la famille : « Je ne ferai jamais un spot avec une famille homosexuelle, pas par manque de respect mais parce que je ne suis pas d'accord avec eux. Notre famille est de type traditionnel. » Et le PDG du groupe alimentaire qui porte son nom d’enfoncer le clou : « Si les gays ne sont pas d'accord, ils peuvent toujours manger les pâtes d'un autre fabricant. »
Les médias en général, les réseaux sociaux et les associations LGBT en particulier, mais aussi les concurrents du fabricant italien de pâtes ont aussitôt dénoncé comme homophobes les propos de Guido Barilla. Le patron et son entreprise ont alors suscité un triple mouvement de réprobation, de caricatures et de contre-offensives.
Les caricatures ont présenté Guido Barilla pour ce qu’il est : pis qu’un simple chef d’entreprise qui trébuche en s’emmêlant les pâtes.
Sur le front des contre-offensives, plusieurs concurrents de Barilla ont mis en avant leur propre politique friendly voire carrément militante. Et surtout, de nombreuses associations LGBT, en particulier italiennes et américaines, ont appelé à un boycott de fait de la marque italienne dans le monde entier. C’est seulement à ce moment-là que Guido Barilla a présenté des excuses.
La marque de pâtes affirme désormais promouvoir la diversité et l’égalité, en interne comme à travers sa communication d’entreprise. Cette initiative correspondrait à une stratégie mise en place depuis plus d’un an au sein d’un groupe alimentaire dont les marques incluent Harry’s et Wasa.
L’un des éléments de cette nouvelle campagne implique l’organisation en 2014 d’un concours de vidéos en ligne montrant les multiples facettes des pâtes (et de ceux qui les mangent). D’ici là, le groupe Barilla compte véhiculer des publicités moins machistes voire plus homophiles.
Le géant italien vient ainsi d’annoncer, le 4 novembre 2013, la création d’un comité consultatif chargé de la diversité et de l’égalité (communiqué de presse). Au sein de ce comité siégera l’écrivain et activiste américain David Mixner, héraut de l’égalité des droits pour la communauté LGBT.
Barilla annonce en outre sa participation au Corporate Equality Index, classement des entreprises au regard de critères LGBT créé par l’association LGBT américaine Human Rights Campaign.
Les mesures annoncées par Barilla correspondent à une « communication de crise ». On présente des excuses, on fait des promesses et on laisse les pâtes rissoler dans une fine couche d’oubli.
Comparons l’affaire Barilla avec deux affaires similaires – au moins à travers l’homophobie véhiculées par certains discours.
En octobre 2009, Louis Nicollin, président du club de football de Montpellier, qualifie un joueur adverse de « petite tarlouze ». Il fait ensuite amende honorable et mène diverses actions friendly qui lui valent d’obtenir en 2012 le prix Pierre-Guénin contre l’homophobie et pour l’égalité des droits (page Facebook). La distinction et sa récompense lui sont retirées peu après, suite à de nouvelles injures homophobes.
Update. Louis Nicollin est mort le 29 juin 2017 à l’âge de 74 ans.
En 2010, des phrases homophobes sont attribuées à plusieurs membres de Sexion d’Assaut, confirmant les paroles d’anciennes chansons du groupe de rap français. Les membres du groupe rencontrent par la suite des associations LGBT, en particulier Le Refuge, afin de mieux comprendre la portée de leurs paroles et de leurs actes.
Deux noms très connus, deux stratégies fort différentes à la suite de propos homophobes. Sexion d’Assaut a choisi la voie de la discussion et de la pédagogie ; peut-être par sincérité, peut-être par souci d’enrayer les annulations de concerts. Louis Nicollin a choisi les belles promesses avant de replonger, comme un alcoolique promet de ne plus boire et termine son discours par une cuite monumentale.
J’ignore si les rappeurs ont agi par sincérité ou par calcul, mais je suis convaincu que Nicollin et Barilla ont présenté des excuses, tardives et insincères, par pure duplicité.
Les associations LGBT, les personnalités gay et lesbiennes doivent-elles mener ostensiblement des actions avec des homophobes notoires, au motif qu’ils ont présenté des excuses soi-disant sincères ? Le risque de se tromper est aussi grand avec des homophobes repentis que celui de faire confiance à des mafieux, alcooliques ou drogués repentis. Je ne minimise pas le repentir, je constate seulement le risque de récidive.
Il serait beaucoup plus productif pour la communauté, selon moi, de mener campagne avec les entreprises concurrentes des groupes Nicollin – le Loulou est aussi un homme d’affaires – et Barilla. Que l’on pardonne, soit. Mais que les coupables commencent déjà par purger leur peine. Purger, donc payer. Financièrement. À la hauteur de leurs moyens.
Philca / MensGo