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Forte mobilisation contre l’homophobie au Mississippi et en Caroline du Nord

(Blogmensgo, blog gay du 14 avril 2016) Le gouverneur du Mississippi a ratifié, le 5 avril 2016, une loi permettant de discriminer des personnes LGBT en toute légalité. Mais de nombreuses entreprises et personnalités se mobilisent contre ce texte explicitement homophobe. Dans le même temps, la mobilisation contre un texte similaire contraint la Caroline du Nord à lâcher un peu de lest.

Mississippi : une « liberté de conscience » clairement homophobe

Le républicain Phil Bryant, gouverneur du Mississippi, a porté et contresigné une loi intitulée « loi pour protection de la liberté de conscience contre la discrimination du gouvernement » (Protecting Freedom of Conscience from Government Discrimination Act). Le gouvernement dont il est question est le gouvernement fédéral, qui fait appliquer sur tout le territoire américain l’arrêt du 26 juin 2015 de la Cour suprême légalisant le mariage gay (notre article).

Cette loi HB-1523 entre en vigueur au Mississippi le 1er juillet 2016. Son préambule (section 2) montre pour quel public elle a été taillée sur mesure :

texte de loi

Sont donc « protégées » par cette loi toutes les « croyances religieuses ou convictions morales » tendant à considérer que le mariage ne peut unir qu’un homme et une femme, que les relations sexuelles sont réservées à ce seul type de mariage et que l’identité sexuelle d’une personne est obligatoirement celle qui lui est assignée à la naissance.

« Croyances religieuses », au nom de l'amour la haine

Fortes de ces convictions « sincères », les personnes physiques ou morales pourront licencier ou refuser d’embaucher des gays, lesbiennes, bis et trans au simple motif que les personnes LGBT choquent leurs croyances ou convictions. Des commerçants pourront refuser de servir des personnes LGBT sous prétexte qu’elles sont LGBT. Même les médecins et les cliniques pourront s’appuyer sur ce texte pour justifier un refus de consultation ou de soins.

Outre l’ensemble des organisations LGBT, de nombreuses voix issues de la société civile réclament l’abrogation intégrale de la nouvelle loi homophobe du Mississippi. C’est ainsi que 95 écrivains et auteurs du Mississippi ont cosigné, le 11 avril 2016, une déclaration contre cette loi.

Les 95 signataires du Mississippi se disent « opposés à toute violation des droits civils, y compris la discrimination contre les citoyens LGBTQ, et appellent à l’abrogation » de la loi homophobe.

Les 95 auteurs s’insurgent contre le « côté réactionnaire » du Mississippi qui « considère la différence comme une menace ». Au contraire, écrivent-ils, « la bienveillance foncière, l’inclusion de l’extravagance et de l’étrangeté, a nourri la grande littérature en provenance de notre État. […] Ce que la littérature nous apprend, c’est l’empathie. » Et d’ajouter « qu’il est très perturbant pour beaucoup d’entre nous de voir que cette rhétorique de haine, à peine voilée, empoisonne une nouvelle fois notre discours politique ».

La plupart des 95 noms sont inconnus en dehors des États-Unis voire du Mississippi. Mais la pétition contient deux têtes d’affiche mondialement connues : Donna Tartt et John Grisham.

Phil Bryant
Phil Bryant, homophobe jusqu'au nœud de la cravate.

Homophobie et conséquences (économiques)

La mobilisation contre des lois homophobes a enregistré plusieurs succès consécutifs ces dernières semaines, en particulier face à la Géorgie et à la Caroline du Nord. Dans les deux cas, ce sont les conséquences économiques défavorables qui incitent les dirigeants politiques à faire marche arrière ou à ne pas aller jusqu’au bout de leur homophobie.

Le 28 mars 2016, le gouverneur de Géorgie annulait une législation homophobe. Disney, Sony, Time Warner et d’autres multinationales lui avaient auparavant fait savoir qu’ils gelaient leurs projets et leurs investissements dans son État.

La Caroline du Nord paye le prix de son homophobie (mais reste homophobe)

Un mouvement similaire de rétorsions cible la Caroline du Nord, où le gouverneur républicain Pat McCrory a promulgué, le 23 mars 2016, une loi (dite HB2 et surnommée bathroom bill, c’est-à-dire loi sur les toilettes publiques) qui prétend obliger les personnes trans à présenter un certificat médical pour utiliser des toilettes qui ne correspondraient pas à leur identité sexuelle administrative.

Les géants de l'économie contre-attaquent

Plusieurs géants de l’économie mondiale ont aussitôt contre-attaqué, à l’image de Deutsche Bank, qui emploie 900 personnes en Caroline du Nord et gèle la création de 250 postes supplémentaires. Google Ventures refuse désormais d’investir dans cet État.

De son côté, PayPal renonce à embaucher 400 diplômés pour s’installer à Charlotte. Cette ville avait pourtant l’intention d’édicter une réglementation plus favorable aux personnes trans. Mais la loi signée par le gouverneur empêche précisément toute juridiction municipale ou locale de voter des lois plus inclusives.

D’autres mastodontes ont fait part au gouverneur de leur préoccupation et n’excluent pas de geler leurs investissements ou recrutements en Caroline du Nord. Tous les secteurs sont concernés, de la banque (Bank of America) aux transports (American Airlines, Uber), en passant par la librairie (Barnes & Noble) et l’économie numérique (Apple, eBay).

Les concerts font salle vide

Plusieurs célébrités pop-rock ont également annoncé un boycott de la Caroline du Nord. Ainsi Bruce Springsteen a-t-il annulé un concert qu’il devait donner à Greensboro le 10 avril. Ringo Starr supprime son concert du 18 juin et Bryan Adams va faire de même ce soir 14 avril et ne chantera donc pas à Biloxi.

[mises à jour]

Update du 19 avril 2016. Le groupe musical Pearl Jam vient aussi d'annuler le concert qu'il devait donner le 20 avril en Caroline du Nord. Le Cirque du soleil a fait de même.

Update du 28 avril 2016. La chanteuse Demi Lovato, qui devait se produire en Caroline du Nord les 30 juin et 3 juillet 2016, vient elle aussi d’annuler ses deux concerts.
[fin des mises à jour]

Homophobes privés de porno

Plus insolite, XHamster bloque désormais les adresses IP en provenance de Caroline du Nord. En mars 2016, les mots transsexual et gay ont été recherchés respectivement 400.000 et 319.907 fois sur le site pornographique par des utilisateurs domiciliés dans cet État.

Face aux pressions, le gouverneur de Caroline du Nord envisage de restreindre la portée du texte aux écoles et aux bâtiments publics. Le secteur privé ne serait alors plus concerné par la loi transphobe.

Mais la loi reste anti-LGBT, donc la pression subsistera jusqu’à son entière abrogation.

Nicolas Batum
Nicolas Batum. Homophobie ou pas, le basketteur français des Charlotte Hornets continue de dunker. ©NBAE / Getty Images.

La NBA prive Charlotte de son All-Star Game

[Update du 25 juillet 2016.] En juin 2015, la ligue de basket-ball professionnelle avait attribué la tenue du 2017 NBA All-Star Game à la Time Warner Arena de Charlotte. Le fief du club des Charlotte Hornets devait y accueillir, le 19 février 2017, cet événement sportif ultramédiatique dont les recettes attendues avoisinent les 100 millions de dollars.

Mais face à l'intransigeance de la Caroline du Nord, qui refuse d'abroger la loi HB2, la NBA a décidé que l’édition 2017 ne se tiendrait pas à Charlotte en Caroline du Nord, mais en un autre lieu (peut-être en Louisiane, à La Nouvelle-Orléans). L'instance dirigeant du basket américain a toutefois ménagé une porte de sortie en précisant que la ville de Charlotte serait la bienvenue pour accueillir l’édition 2019 du NBA All-Star Game.

L'ancien basketteur Michael Jordan, propriétaire des Charlotte Hornets, exprime par conséquent sa déception de ne pouvoir accueillir l’événement l’an prochain tout en disant « heureux que la NBA ait laissé la porte ouverte ».

Le sous-entendu : si la Caroline du Nord n’abroge pas sa loi homophobe et transphobe au moins deux ans avant la tenue effective de l’événement, Charlotte n’aura qu’à se faire dunker ailleurs.
[fin de la mise à jour]

 

[Update du 29 août 2016.]

Les habitants de Caroline du Nord moins homophobes que leurs élus ?

Les lois homophobes de Caroline du Nord recueillent-elles l’assentiment de la population locale ? Pas si sûr.

Non à la discrimination homophobe, mais…

Selon un sondage publié le 10 août 2016 par l’institut PRRI, les habitants de Caroline du Nord sont très largement favorables à des lois interdisant la discrimination des personnes LGBT en matière d’emploi et de travail, de logement et d’accès aux infrastructures publiques.

Pas moins de 64 % des résidents de Caroline du Nord sont favorables à de telles lois antidiscrimination, contre 71 % à l’échelle nationale. En revanche, 31 % des sondés en Caroline du Nord refusent la promulgation de lois interdisant la discrimination des gays, lesbiennes, bisexuels et trans.

En Caroline du Nord comme dans le reste des États-Unis, les mêmes clivages générationnels (jeunes plus favorables que les vieux), politiques (démocrates plus conciliants que les républicains) et religieux (les catholiques, athées, agnostiques et protestants non évangéliques y sont favorables) divisent les partisans et les opposants aux lois antidiscrimination. De même les deux grands zones urbaines, celle de Charlotte et celle Raleigh-Durham, sont favorables aux lois antihomophobes à hauteur de 71 %, alors que les répondants des zones à moins forte densité de population ne sont que 60 % à souhaiter des lois contre la discrimination des personnes LGBT.

À noter que de telles lois recueillent la faveur des Noirs (60 %) presque autant que des Blancs (65 %) en Caroline du Nord.

… les prétextes religieux ont la vie dure

Les petites entreprises sont-elles fondées à invoquer des convictions religieuses pour refuser de servir des personnes LGBT ? Non, estiment 56 % des résidents de Caroline du Nord. Oui, estiment 37 % des habitants de l’État. Ces proportions sont presque identiques à celles enregistrées parmi la population américaine (notre article). Avec, là aussi, les mêmes clivages en fonction de l’âge, de l’obédience religieuse, etc.

À noter que la discrimination des personnes LGBT par les petites entreprises pour motifs religieux est nettement plus refusée par les Noirs du Caroline du Nord (69 %) que par les Blancs (50 %). Dans l’autre sens, pas moins de 42 % des Blancs de Caroline du Nord estiment que les convictions religieuses sont une raison valable pour qu’une petite entreprise refuse de servir une personne LGBT, alors que 24 % seulement des Noirs y voient un motif acceptable.

sondage mariage gay 2016 en Caroline du Nord

Le mariage gay n’a pas la cote

Selon les calculs de PRRI, 47 % des habitants de Caroline du Nord (37 % à l’échelle nationale) s’opposent à la légalisation du mariage entre personnes de même sexe, alors que 46 % y sont favorables (53 % dans l’ensemble des États-Unis). Les clivages sont plus ou moins identiques en Caroline du Nord et dans l’ensemble de la population nationale, à l’exception des clivages religieux qui sont plus accentués.

infographie mariage gay et discrimination anti-LGBT en Caroline du Nord

Quand la religion confine à la schizophrénie

On observe aussi un contraste parfois très marqué entre les chiffres de l’acceptation du mariage gay et ceux de l’acceptation de lois condamnant la discrimination anti-LGBT, avec presque vingt points d’écart dans l’ensemble de la population de Caroline du Nord (soit respectivement 46 % et 64 %, cf. l’infographie ci-dessus).

Seules les personnes sans affiliation religieuse (athées et agnostiques) affichent un niveau d’acceptation quasi identique sur les deux sujets (74 % et 73 %). La différence, très nette avec les autres obédiences religieuses, dépasse même les quarante points chez les protestants évangéliques blancs (26 % contre 54 %).
[fin de la mise à jour.]

Commentaire. La décision de la NBA est d’autant plus méritoire que la ligue du basket professionnel nord-américain a souvent été le théâtre – par clubs ou joueurs interposés – de déclarations plus ou moins ouvertement homophobes. On rappelle d’ailleurs que Jason Collins reste le seul basketteur américain de haut niveau à avoir fait son coming out (notre article).

Cette décision est toutefois moins « courageuse » qu’il n’y paraît. Il s’agit moins d’un acte friendly ou militant que d’une volonté pour la ligue de se refaire une virginité en matière d’éthique, après avoir connu une série de scandales (à trois points) ces derniers temps.

Philca / MensGo
(via ActuaLitté et Le Monde du 14 mars 2016)

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