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Le Festival du film de Londres (LFF, ou FFL en français) ne doit pas être confondu avec le London LGBT Film Festival, alias BFI Flare, lui aussi organisé par le British Film Institute (BFI),mais dont la 31e édition a eu lieu en mars 2017.
Ci-dessous, la bande-annonce du BFI LFF (4-15 octobre 2017).
La programmation LGBT du London Film Festival 2017 est revue à la hausse, car cette année marque le cinquantenaire de la dépénalisation partielle de l’homosexualité en Angleterre et au pays de Galles, en 1967. Mais les organisateurs ne précisent pas le nombre exact de longs métrages ou courts métrages LGBT programmés pour le festival cinématographique d’octobre 2017.
La mention d’une composante LGBT jouxte l’annonce d’une programmation plus ou moins spécifique à diverses minorités visibles (Noirs, femmes, handicapés) et invisibles (gays, lesbiennes, immigrés). J’ignore s’il faut y voir un acte de militantisme, un conformisme bien-pensant ou une forme plus ou moins déguisée de misérabilisme voire de stigmatisation.
Quoi qu’il en soit et vu l’extrême compacité de l’agenda prévisionnel, je me bornerai ci-dessous à mentionner quatre titres plus ou moins emblématiques, par ordre croissant de buzz.
Avant de commencer, signalons que la programmation d’octobre propose aussi une présentation spéciale du festival BFI Flare assortie d’une projection du film A Fantastic Woman, où le réalisateur Sebastián Lelio évoque une personne trans confrontée à la mort de la personne aimée.
Le BFI London Film Festival 2017 regroupe une partie des 242 longs métrages et 128 courts métrages – en provenance de 67 pays – dans une demi-douzaine de sections thématiques ou programmatiques. La section amour (Love) propose ainsi au moins deux films à contenu LGBT.
Dans Close-Knit, Naoko Ogigami dresse le portrait d’une femme trans chez qui la jeune nièce de son petit ami ravive des sentiments maternels.
Pour s’en faire une idée, j’ai volontairement choisi ci-dessous la bande-annonce du film en japonais sans sous-titres.
Toujours en section Love et cette fois-ci en première mondiale, Carlos Marques-Marcet raconte dans Anchor and Hope l’irruption d’un dragueur impénitent (David Verdaguer) dans le petit appartement qu’habite un couple de lesbiennes, Eva (Oona Chaplin) et Kat (Natalia Tena). Or, il se trouve qu’Eva, bientôt quadragénaire, a très envie d’avoir un enfant.
En l’absence de bande-annonce, on ne peut s’en remettre qu’à l’unique photographie officielle disponible pour l’instant – et qui, ma foi, suggère une comédie bien sympathique.
Une autre section du festival présente des films sous l’étiquette Mayor of London (maire de Londres). C’est le cas de Call Me By Your Name, long métrage de Luca Guadagnino déjà présenté en 2017 à la Berlinale et aux festivals de Sundance (États-Unis) et Sydney (Australie). C’est l’histoire d’un talentueux musicien de 17 ans, Elio (Timothée Chalamet), qui rencontre pendant ses vacances d’été un séduisant professeur de 24 ans, Oliver (Armie Hammer).
Ci-dessous, la bande-annonce de Call Me By Your Name – où l’on note qu’Elio semble avoir moins de 17 ans et Oliver beaucoup plus que 24 ans, mais peu importe pourvu que le coup de foudre se produise avant la fin des vacances…
Le titre le plus connu des quatre longs métrages dont je parle ici est aussi le seul à concourir dans la compétition officielle principale. Il s’agit en l’occurrence de 120 battements par minute (ou 120 BPM, en français comme en anglais), film où le réalisateur et coscénariste Robin Campillo évoque la grande époque d’Act-Up Paris, c’est-à-dire le militantisme et les happenings des années 1990 sur fond de sida et d’une histoire d’amour impossible puisque le sida tuait encore en masse à cette époque-là dans les pays riches – Hervé Guibert, Jacques Demy, Miles Davis, Anthony Perkins, Cyril Collard, Arthur Ashe et bien d’autres en furent les victimes les plus connues.
Update. Ce film représentera la France aux Oscars, en mars 2018, dans la catégorie du meilleur film étranger.
Ci-dessous, la bande-annonce – en français – de 120 battements par minute :
Rien que la bande-annonce – un modèle du genre – donne envie de voir le film de Campillo. Si l’on y ajoute le jeu très inspiré des acteurs principaux (y compris l’actrice Adèle Haenel, qui est par ailleurs la compagne de la réalisatrice Céline Sciamma) et Bronski Beat en fond sonore, on comprend le succès populaire du film et les distinctions que la critique lui a décernées, à commencer par le grand prix du jury à Cannes.
Mais la réaction des médias français aura été moins unanime qu’il n’y paraît. Sauf erreur de ma part, aucun média de droite ne s’est vraiment décarcassé pour évoquer le film et le contexte qu’il met en scène. Les magazines qui ont mis le film à la une sont notoirement de gauche, à l’image de l’hebdomadaire Les Inrockuptibles, dont la livraison du 23 août 2017 lance un cri d’amour cinéphilique.
Même Le magazine du Monde, supplément hebdomadaire d’un quotidien aujourd’hui beaucoup plus centriste que gauchiste, y est allé de sa couverture.
Alors, serait-on tenté de croire, cela signifie que les Français ont enfin pris conscience de la réalité et des enjeux du sida, de la stigmatisation que subissent les séropos, de l’indispensable égalité des droits, et aussi de la beauté de tout amour, qu’il soit homosexuel ou hétérosexuel ?
La réponse est ô combien négative !
Les projecteurs braqués sur 120 BPM ne sauraient masquer le quasi-silence de nombreux médias. Et puisque l’on parlait des Inrockuptibles, le numéro du 16 août 2017 consacré à la « rentrée littéraire » – autre phénomène bien français – contient une enquête sur la vie des personnes LGBT en milieu carcéral. Le quotidien des lesbiennes et des gays y confine régulièrement au cauchemar, pédé étant abusivement associé à pédophile, donc délinquant sexuel. Pour les personnes trans, le cauchemar se transforme souvent en un calvaire sans fin. Les détenus ferment les yeux, l’administration ferme les yeux, le grand public veut encore plus de sévérité. Et si en plus tu as le malheur d’être séropo, c’est encore pire. Car dans les prisons, le simplisme du discours tend à remplacer la sophistication du raisonnement. Si tu es séropo, tu es donc pédé, donc pédophile, donc pointeur (c’est ainsi que l’argot carcéral désigne les délinquants sexuels), donc on te tabasse pour t’apprendre à vivre.
Comment se matérialise la discrimination des personnes LGBT en milieu carcéral ? En fermant les yeux ou en pratiquant une violence sélective, comme on l’a vu ci-dessus. Le personnel pénitentiaire n’est pas non plus avare d’omissions ou d’erreurs volontaires. On oubliera de signaler la mise en danger d’une personne (automutilations, viols à répétition, etc.) ou l’on mettra à la vue de tous un document à caractère confidentiel. L’enquête des Inrocks évoque ainsi le cas d’un détenu dont le dossier médical fut par erreur « oublié » sur une table, à la vue de tous, la première page du dossier étant assortie d’une mention au feutre rouge visible à plusieurs mètres de distance : VIH – trois lettres qui ont amorcé, pour le séropo ainsi « outé » par le personnel soignant, un calvaire de plusieurs mois.
C’est dire qu’il faudra encore bien des films comme 120 BPM pour faire comprendre aux gens tout le mal qu’ils font en croyant bien faire.
[Update du 4 mars 2018.] Le 2 mars 2018, la cérémonie des Césars 2018 a récompensé 120 battements par minute de six statuettes, dont celle du meilleur film. Voici les six césars qu’a obtenus 120 battements par minute :
Robin Campillo a profité de son passage en tribune (ci-dessous, son en français avec quelques images fixes, YouTube ne disposant pas des droits TV de la cérémonie) pour lancer une diatribe contre les effets secondaires de certaines mesures répressives, quelle que soit la minorité contre qui elles sont votées. Effets secondaires, car ils ne se mesurent que dans un second temps – quand on s’aperçoit que ces mesures répressives ont produit un champ de ruines.
Philca / MensGo