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(Blogmensgo, blog gay du 30 novembre 2017) Le Premier ministre canadien Justin Trudeau a présenté devant le Parlement, le 28 novembre 2017, les excuses officielles de la nation pour l’oppression et la discrimination des personnes LGBTQ par les lois, règlements et pratiques fédéraux. Le Canada indemnisera toutes les personnes qui ont subi ces outrages pendant des décennies, a précisé le chef du gouvernement fédéral.
Justin Trudeau a officialisé les excuses de la nation à travers un discours empreint de solennité et d’émotion. Un discours bilingue de presque une demi-heure, applaudissements compris, à la fin duquel Trudeau et de nombreuses personnes ont séché des larmes non feintes.
Voici le discours de Justin Trudeau, en français et en anglais, entièrement sous-titré en anglais :
Le Premier ministre a souligné que non seulement la faute était ignoble, mais que le retard pris dans la reconnaissance des responsabilités et du fait qu’il s’agissait d’une véritable « chasse aux sorcières », dans la repentance et dans l’indemnisation des victimes, tout cela aura ajouté l’ignominie à l’horreur.
Car faute il y a eu, et Justin Trudeau n’a aucunement cherché à le nier ou à le minimiser. La fin de son discours est emblématique à cet égard :
For the oppression of the lesbian, gay, bisexual, transgender, queer, and two-spirit communities, we apologize. On behalf of the government, parliament, and the people of Canada: We were wrong. We are sorry. And we will never let this happen again.
(Pour l’oppression des communautés LGBTQ2, nous présentons des excuses. De la part du gouvernement, du Parlement et du peuple du Canada : nous avons eu tort ; nous sommes désolés ; et nous ne laisserons plus jamais cela advenir.)
Justin Trudeau, Premier ministre du Canada, le 28 novembre 2017
Les excuses officielles s’adressaient plus spécialement aux personnes qui ont été les victimes directes de l’homophobie institutionnalisée pendant quatre décennies, de 1950 jusque vers 1990. Et peut-être même – le discours ne le précise pas – jusqu’à la légalisation en 2005 du mariage homosexuel au Canada.
Deux allocutions ont suivi celle du Premier ministre fédéral. Andrew Scheer et Guy Caron, chefs respectivement du Parti conservateur (dont plusieurs membres n’ont pas voulu assister à la cérémonie) et de la formation parlementaire des néodémocrates, ont eux aussi condamné l’homophobie d’État aujourd’hui révolue et présenté des excuses officielles.
La stigmatisation était telle qu’il aura fallu attendre l’année 1988 pour qu’un député canadien – en l’occurrence, Svend Robinson – officialise pour la première fois son homosexualité.
Toutes les condamnations pénales pour homosexualité (« grossière indécence, sodomie ou relations sexuelles anales » entre personnes consentantes âgées d’au moins 16 ans) seront par ailleurs effacées des casiers judiciaires. Un projet de loi en ce sens a été déposé, le 28 novembre 2017, devant le Parlement. Cette mesure concerne les peines prononcées jusqu’en 1969, date à laquelle l’homosexualité fut dépénalisée au Canada sous l’impulsion de Pierre Elliott Trudeau, père de l’actuel Premier ministre et qui dirigeait le gouvernement fédéral de l’époque. Mais l’effacement de ces condamnations ne sera pas automatique, puisqu’il faudra expressément en faire la demande, que celle-ci émane de la victime elle-même ou de sa famille à titre posthume.
Les excuses officielles du Canada se matérialiseront aussi par un monument du souvenir et par un chèque d’indemnisation.
Le discours de Justin Trudeau est intervenu quelques heures après l’annonce d’un accord amiable pour l’indemnisation de 3.000 victimes de discrimination et de brimades homophobes et transphobes. L’accord, qui fait suite à une plainte en nom collectif (class action), transige sur une indemnité de 110 millions de dollars canadiens, soit 37.000 dollars en moyenne pour chaque plaignant (environ 72 millions d’euros, soit 22.000 euros chacun). De fait, l’indemnisation minimale sera de 5.000 dollars (3.300 euros) par victime et elle pourra atteindre, dans certains cas, un plafond de 150.000 dollars (99.000 euros).
La transaction prévoit une enveloppe globale pouvant atteindre jusqu’à 145 millions de dollars (95 millions d’euros). Outre l’indemnisation ci-dessus, elle inclura une dotation de 15 millions de dollars (10 millions d’euros) pour financer divers projets mémoriels, le principal étant la construction d’un mémorial dans la capitale fédérale, Ottawa. Ce monument portera témoignage de la discrimination active de l’administration et des pouvoirs publics, en particulier dans la police, l’armée et la fonction publique. Le mémorial sera aussi dédié aux personnes qui se sont suicidées à cause de la discrimination et de la stigmatisation homophobes.
Voici le même discours officiel de Justin Trudeau, donc en français et en anglais, mais sans aucun sous-titrage :
En regardant la vidéo et les larmes du Premier ministre, un nom m’est venu à l’esprit : Denis Diderot. L’écrivain français se demandait, dans le Paradoxe sur le comédien, si les larmes du comédien montent du cœur ou si elles descendent du cerveau.
Nul doute que Justin Trudeau est bon comédien. Nul doute non plus que Trudeau est authentiquement LGBT-friendly. Ses participations récurrentes à diverses Gay Prides ne sont ni du chiqué ni de la communication opportuniste. Alors, ces larmes de Justin Trudeau ? À mon avis, elles sont assez nombreuses et sincères pour monter du cœur et descendre du cerveau.
Philca / MensGo