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(Blogmensgo, blog gay du 1er février 2018) « L’homophobie tue », titre l’hebdomadaire français Les Inrockuptibles dans son numéro 1157 du 31 janvier 2018. Dans ce numéro pas comme les autres, le magazine Les Inrocks développe un dossier sur l’homophobie à travers trois reportages consacrés respectivement au Mali, à la Tchétchénie et à la France rurale. Une initiative rare, solidaire et courageuse.
L’hebdomadaire culturel et politique Les Inrockuptibles, classé à gauche, a choisi de mettre à la une l’un des grands scandales de l’(in)humanité. Pourquoi cela ? L’éditorial de Pierre Siankowski explique l’impossibilité, pour un journaliste digne de ce nom, de fermer les yeux et de se taire.
Nous ne pouvons pas tolérer que quelqu’un soit, en 2018, en danger de mort en raison de son orientation sexuelle. C’est un enjeu d’humanité, une question centrale pour notre avenir à tous.
(Pierre Siankowski, directeur de la rédaction des Inrocks)
On pourra, certes, regretter le traitement d’un tel sujet par l’évocation plus ou moins fouillée de trois pays seulement.
On pourra aussi, bien sûr, déplorer quelques approximations. « L’homophobie gagne du terrain, aux États-Unis et partout ailleurs », affirme Pierre Siankowski dans son édito. Allégation hâtive qu’aucun chiffre n’est en mesure de corroborer. De même que l’homosexualité n’est pas un acte (n’en déplaise aux homophobes qui la résument à la sodomie entre mecs ou à la fornication entre nanas), l’homophobie n’est pas un acte mais un sentiment ou une maladie. Or, on ne peut « mesurer » un ressenti que d’une manière imparfaite car biaisée, et l’on ne peut mesurer une épidémie d’une manière satisfaisante que si l’on dispose de l’outillage statistique adéquat.
De fait, ce n’est pas l’homophobie qui « gagne du terrain », mais sa (sur)médiatisation et sa radicalisation, cette-là attisant celle-ci et celle-ci renforçant celle-là. Plus l’homophobie est médiatisée, plus elle acquiert une visibilité que n’autorisaient pas les outils médiatiques de grand-papa. Et plus l’information se diffuse, plus le sentiment qu’elle évoque est susceptible d’influencer des esprits faibles et des intelligences atrophiées, leur faisant croire à une « invasion » qui n’a jamais eu lieu et à une « menace » aussi crédible qu’une offensive armée du Liechtenstein contre les États-Unis.
Il n’empêche. L’hebdomadaire Les Inrockuptibles a choisi de ne mettre à la une ni titraille racoleuse, ni photo ou image, ni illustration d’aucune sorte. Juste un cartouche « L’homophobie tue » sur un fond dont la trame symbolise illico un arc-en-ciel, donc un parti pris rédactionnel militant.
Un tel choix de ne montrer aucun visage, aucune image, aucun pathos – ce choix correspond à un suicide commercial assumé, car il est bien évident que titrer sur l’homophobie ne « fait pas vendre ». Un « acte gratuit » que MensGo et son blog gay tenaient à saluer.
On loue d’autant plus l’initiative qu’elle amènera peut-être des homophobes « passifs » à reconsidérer leurs idées reçues et leurs opinions à l’égard des personnes LGBTQI (lesbiennes, gays, bis, trans, queers, intersexes).
Peut-être ce numéro pas comme les autres des Inrocks fera-t-il même réfléchir des personnes, pourtant bien intentionnées voire carrément friendly, au fait que nul cliché et nulle expression toute faite, aussi anodins et innocents qu’ils apparaissent, ne sauraient être tolérés plus longtemps. Car le simple fait de dire « Moi j’ai des couilles » (avec pour sous-entendu que les « pédés » n’auraient aucune virilité) ou bien « Ah ! l’enculé… » (les « pédés » étant des salauds, forcément) ou encore de singer des gestes de « folle » ou de « camionneuse » – tout cela contribue, même si l’on n’en a pas conscience, à entretenir un imaginaire collectif homophobe.
Bref, on recommande à tout le monde d’acheter un exemplaire de ce numéro exceptionnel, en version papier ou en ligne. Même si c’est pour ne pas le lire et même si l’on ne comprend pas le français. Juste pour appuyer l’initiative des Inrockuptibles et saluer ce geste éditorial exemplaire.
Je rappelle aussi que dans son numéro du 16 août 2017, ce magazine proposait une enquête sur la vie des personnes LGBT en milieu carcéral, suggérant implicitement que la France n’a rien du « berceau des droits de l’homme » qu’elle prétend être.
Philca / MensGo